top of page

Cliquer sur les images pour les afficher intégralement et les ouvrir dans un nouvel onglet

Image composite HOO et RGB

Planewave CDK 12.5, Caméra QHY600M, Monture Paramount II

88x600s en OIII, soit 14.6H,  81x600s en Hα soit 13.5H et 30 minutes de R, G et B pour les étoiles

Acquisitions entre mi janvier et début février

Team Astrochile, Obstech, Chili.


Les deux images en échelle de gris montrent la différence assez nette entre les couches OIII et Hα avec l'arc de choc centré sur BD - 22º 3467

Abell 35 - Sh2-313

Une nébuleuse pas si planétaire que ça

Introduction

Cette seconde image traitée en partenariat avec JP Cazard nous a fait travailler nos process de traitement en filtres Narrowband. Certains problèmes sont résolus (au moins temporairement) et cette image a gagné en maturité par rapport à la première. Il s'agit d'une nébuleuse peu imagée, que Yann Pothier a détaillé dans sa rubrique Ciel Extrême du numéro 109 d'Astrosurf.

La plaque POSS en filtre R sur laquelle a été découverte Abell 35 en août 1955

Description

Référencée PN A66 35 dans le catalogue Simbad, Abell 35 (Sharpless, Sh2-313) a été considéré plusieurs décennies après sa découverte comme une nébuleuse planétaire (NP) et l’est d’ailleurs toujours selon SIMBAD, qui se réfère à la publication de Frew et al. datant de 2013 et sur laquelle nous reviendrons plus bas.


Découverte en 1955 dans la constellation de l’Hydre (Hydra) par George Ogden Abell, elle est mesurée à environ 16 x 11’ de taille apparente avec une faible luminosité de surface  et a été référencée avec 73 autres NPs dans la publication Amas globulaires et nébuleuses planétaires découvertes lors du relevé du ciel de l’Observatoire de Palomar de la National Geographic Society, papier qui introduira le célèbre Catalogue Abell des Nébuleuses Planétaires (Abell Catalog of Planetary Nebulae) publié en 1966. Le catalogue comprend 86 entrées considérées comme étant des nébuleuses planétaires dont la moitié sont le travail de Albert George Wilson et l'autre moitié celui d’Abell, de Robert George Harrington et de Rudolph Minkowski. Tous les objets ont été découverts dans le cadre du relevé astronomique de la National Geographic Society - Palomar Observatory Sky Survey réalisé en août 1955 à l'aide de plaques photographiques produites grâce au télescope de 48 pouces (1,2192 m) Samuel Oschin du mont Palomar (les fameuses « plaques POSS », pour Palomar Optic Sky Survey).

Sens de déplacement de la binaire centrale au sein d'Abell 35.

Acquisision KPNO en filtre OIII.

Un peu de science

Le premier à avoir émis des réserves sur la nature d’Abell 35 est Jacoby.


Comme il le remarquait déjà à l’époque, Abell 35 est complètement différente lorsqu'elle est photographiée en OIII ou en Hα, ce que montrent les photos en échelle de gris du premier cadre. Dans sa description morphologique de la nébuleuse, Jacoby notait que, s’il n’était pas rare de constater une apparence assez variée des NP selon les filtres d’observations, la situation était assez extrême dans le cas d’Abell 35, l’élément le plus marquant étant une région parabolique en émission OIII complètement absente en Hα. A proximité de l’apex de la parabole se trouve l’étoile BD – 22°3467, assez brillante, qui semble se trouver au sein d’une « cavité » (pour reprendre le terme de Jacoby) où l’émission OIII est très faible.


La première impression qui vient à l’esprit lorsque l’on regarde Abell 35 en émission OIII est celle de voir un arc de choc, comme en avaient déjà décrits Gull et Sofia en 1979 autour de LL Ori et de ζ Oph, mais en beaucoup plus net. Ces structures étaient déjà interprétées comme des bulles de gaz interstellaire déformées par un fort vent stellaire. Mais en 1981, Jacoby objectait déjà que BD – 22°3467 était de type spectral G8 IV, un type d’étoile non associé à de forts vents stellaire, et que par ailleurs, les bulles observées par Gull et Sofia incluaient un rehaussement concomitant de l’émission en OIII et des lignes de Balmer, ce qui n’était pas le cas pour Abell 35. De plus, il notait que BD – 22°3467 n’était pas assez chaude pour ioniser la nébuleuse (du fait du type spectral G8) et il émit l’hypothèse de la présence d’un compagnon invisible et chaud qui « alimenterait » la nébuleuse. Cette hypothèse fut vérifiée par la suite, le compagnon chaud ayant une température estimée à plus de 150 000 K.


Par ailleurs, Jacoby remarquait qu’avec une distance estimée d’environ 1 200 années-lumière, son diamètre était donc de l’ordre de 5,2 années-lumière, ce qui en faisait l'une des plus grandes nébuleuses planétaires connues. Et, en plus de cette taille hors norme, un autre problème concomitant soulevé par Jacoby était l’âge de la nébuleuse ; avec cette taille et une expansion de 4.2 km/s, cela signifiait qu’elle aurait été âgée de 185 000 ans, ce qui faisait d’elle aussi la plus vieille nébuleuse planétaire connue. Dernière anomalie, Jacoby notait qu’Abell 35 était située nettement plus haut au-dessus du plan galactique (à 750 années-lumière) que la plupart des nébuleuses planétaires, qui se trouvent plutôt en dessous de 490 AL.


Au final, Jacoby émettait donc l’hypothèse que les disparités morphologiques d’Abell 35 était dues aux effets d'un vent stellaire fort provenant d'une étoile centrale binaire (dont le compagnon chaud restait à découvrir) interagissant avec une enveloppe nébuleuse, cette dernière étant ralentie par le milieu interstellaire. Ses observations donnaient une vitesse transversale de 150 km/s à la binaire centrale avec un vent stellaire émis à 185 km/s et un taux de perte de masse de 3 x 10^(-9) masse solaire par an et une masse de la nébuleuse de 0.2 +/- 0.1 masse solaire. En 1996, Hollis et al. ont par la suite étayé ces conclusions par des observations complémentaires avec une modélisation assez précise.

Cliquer sur les images pour les afficher intégralement et récupérer des informations complémentaires

Greewing & Bianchi confirmèrent la présence de ce compagnon en 1988 lors d’une campagne d’observations UV, et en estimèrent la température à 120 000 K, que Gatti et al mettront en évidence des années plus tard, en 2018, à l’aide du télescope spatial Hubble.


Cependant, à l’image de PHL932 admirablement introduite par JMBéraud, les dernières publications (dans la foulée de la thèse de Frew en 2008 puis des travaux de Frew et Parker en 2010), révèlent qu'Abell 35 n’est pas une nébuleuse planétaire : « [...] la nébuleuse particulière de type PN Abell 35 (Jacoby 1981; Hollis et al. 1996) semble être une nébuleuse en arc à l'intérieur d'une sphère de Strömgren photo-ionisée dans l’ISM ». Abell 35 est donc une sphère de Strömgren ionisée par le compagnon nain blanc chaud DAO de BD - 22º 3467, qui a récemment évolué à partir de la phase nébuleuse planétaire. Le système produit toujours un vent fort, provenant probablement de la sous-géante en rotation rapide qui interagit avec la zone interne de la nébuleuse d'émission pour produire l’arc de choc.


En outre, Ziegler et al. (A&A, 548, A109, 2012) concluent à partir de données récentes de spectroscopie haute résolution que BD - 22º 3467 produit suffisamment de photons à haute énergie pour ioniser le gaz interstellaire environnant. Il semble avoir eu une évolution inhabituelle, n'étant pas assez massif pour gravir la branche des géantes asymptotiques (AGB), et ayant évolué de la branche horizontale étendue vers le stade de naine blanche, expliquant ainsi pourquoi il n'est pas entouré d'une nébuleuse planétaire. Assez chaud à 80 000 K pour ioniser l'ISM ambiant, il imite ainsi parfaitement une nébuleuse planétaire… et explique au final toutes les anomalies relevées par Jacoby dès 1981…

Références :

Amas globulaires et nébuleuses planétaires découvertes lors du relevé du ciel de l’Observatoire de Palomar de la National Geographic Society. O. G. Abell. Publications of the Astronomical Society of the Pacific, Vol. 67, No. 397, p.258-261


A catalogue of integrated Hα fluxes for 1258 Galactic planetary nebulae. D.J. Frew, I.S. Bojicic & Q.A. Parker. Mon. Not. R. Astron. Soc., 431, 2-26 (2013/May-1)


The peculiar planetary nebula Abell 35. G.H. Jacoby. Astrophys. J., 244, 903-911 (1981)


The Abell 35 Nebula Inside Out. Hollis, J. M., van Buren, D., Vogel, S. N., Feibelman, W. A., Jacoby, G. H., & Pedelty, J. A. The Astrophysical Journal v.456, p.644-650, 1996 January 10.


The separation of the stars in the binary nucleus of the planetary nebula Abell 35. Gatti, A. A.; Drew, J. E.; Oudmaijer, R. D.; Marsh, T. R. & Lynas-Gray, A. E. Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, Volume 301, Issue 2, pp. L33-L37.


BD-22°3467, a DAO-type star exciting the nebula Abell 35.  Ziegler, M.; Rauch, T.; Werner, K.; Köppen, J.; Kruk, J. W. Astronomy & Astrophysics, Volume 548, id.A109, 12 pp.


Date  de création : 

Date  de modification :

21 02 2021

30 04 2021

bottom of page