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A gauche, NGC 2440 vue par JB Gayet et JP Cazard au CDK 500 avec caméra Moravian C3-61000. 24x300s en couches L, R, V et B (2 heures) en décembre 2023.


A droite, NGC 2440 vue par Adam Block au Schulman 32-inch RCOS du Mt. Lemmon Skycenter en Arizona.

SBIG STX16803. Expositions RGB = 72:72:72 (3.6 heures), le 1er mars 2018.

La Nébuleuse de l'insecte

NGC 2440 : le cocon d'une naine blanche naissante

Introduction

NGC 2440 est une nébuleuse planétaire située dans la constellation australe de la Poupe (Puppis), vestige du naufrage stellaire d'une étoile semblable au Soleil en fin de vie. Elle a été découverte le 4 mars 1790 par l’astronome britannique William Herschel, qui la décrivit alors comme une « belle nébuleuse planétaire assez brillante, pas très bien définie ». Cette description correspond bien à la nature diffuse et complexe de cet objet, typique des nébuleuses planétaires encore jeunes. 


Sa magnitude visuelle apparente est de l’ordre de 9,4 dans le filtre V (visible) et de 10,8 dans le filtre B (bleu), ce qui en fait un objet accessible aux astronomes amateurs. En effet, bien qu’elle ne soit pas visible à l’œil nu, NGC 2440 peut être observée avec de simples jumelles (à partir de 60–70 mm d’ouverture), ou mieux encore, avec un petit télescope qui en révélera davantage les contours irréguliers et la structure interne brillante.


Les estimations actuelles placent NGC 2440 à une distance comprise entre 3 600 et 4 000 années-lumière. Les structures internes que l'on observe aujourd'hui résultent d’épisodes violents d’éjection de gaz, survenus il y a quelques milliers d’années à peine. 

Cette image, prise par le télescope spatial Hubble de la NASA, révèle les derniers instants d'une étoile semblable à notre Soleil. L'étoile termine sa vie en rejetant ses couches externes de gaz, qui forment un cocon autour de son noyau restant. La lumière ultraviolette émise par l'étoile mourante fait briller la matière. L'étoile épuisée, appelée naine blanche, est le point blanc au centre. Notre Soleil finira par s'éteindre et s'envelopper de débris stellaires, mais pas avant 5 milliards d'années. Notre galaxie, la Voie lactée, est jonchée de ces vestiges stellaires, appelés nébuleuses planétaires. 


Ces objets n'ont rien à voir avec les planètes. Les astronomes des XVIIIe et XIXe siècles les ont nommés nébuleuses planétaires car, à travers de petits télescopes, ils ressemblaient aux disques des planètes lointaines Uranus et Neptune. L'image a été prise le 6 février 2007 avec la caméra planétaire à grand champ 2 du télescope Hubble.

Description

En son cœur réside une naine blanche extrêmement chaude, identifiée sous le nom de HD 62166. Résidu compact de l’étoile initiale, cette naine blanche atteint une température de surface estimée à environ 200 000 kelvins, ce qui en fait l’une des plus chaudes observées dans notre galaxie. De telles températures témoignent de l’intensité du rayonnement ultraviolet qu’elle émet, principal moteur de l’ionisation des gaz qui composent la nébuleuse. 


Malgré sa petite taille — environ 2,8 % du rayon du Soleil —, cette étoile dégage une luminosité considérable, jusqu’à plus de 1 000 fois celle du Soleil, selon certaines estimations. Sa masse est de l’ordre de 0,6 masse solaire, une valeur typique pour une naine blanche. Cependant, sa magnitude apparente, très faible (autour de 17,5 à 17,7), la rend invisible sans un instrument optique puissant. 


NGC 2440 est remarquable par la complexité de sa morphologie, bien plus désordonnée que celle de nombreuses autres nébuleuses planétaires. L’image qu'elle forme est celle d’un système dynamique, résultat d’une succession d’éjections de matière se produisant selon plusieurs axes différents au fil du temps. 


Les observations à haute résolution ont révélé une structure que l'on peut qualifier de "bipolaire", dominée par deux grands lobes de gaz ionisé qui s’étendent de part et d’autre du noyau central. Ces lobes ne sont pas parfaitement symétriques ni linéaires, mais présentent des ondulations, des torsions et des filaments, qui témoignent de la turbulence du milieu. 


Sa forme générale est souvent comparée à celle d’un insecte ailé - lui donnant son nom - ou d’un nœud papillon en raison de la disposition des jets de matière. Le cœur de la nébuleuse semble être structuré autour d’un tore fragmenté — un anneau de gaz et de poussière en expansion — formé de trois grands segments distincts, tandis que les lobes semblent avoir été propulsés à des vitesses supérieures à 40 km/s. Autour de cette zone centrale, on observe également un halo plus diffus, probablement formé à partir d’éjections antérieures et visible principalement dans l’infrarouge.

Image HST prise avec le WFPC-1 en 1992, avant la première mission de maintenance. 

Il s'agit de la première image révélant l'étoile centrale.

Un peu de science

L’analyse spectroscopique de NGC 2440 révèle une nébuleuse particulièrement riche sur le plan chimique. L’étude de son spectre, qui comporte plus de 300 raies d’émission s’étendant de l’ultraviolet au proche infrarouge, permet de dresser un portrait précis des éléments présents et des conditions physiques qui règnent en son sein. 


La température électronique du gaz est estimée à environ 14 200 kelvins, tandis que la densité peut atteindre 5 000 particules par centimètre cube, ce qui indique une nébuleuse encore jeune et dense. Le gaz émis est principalement composé d’hydrogène ionisé, mais on y détecte également des signatures marquées d’hélium, d’azote et de carbone, en quantités supérieures à celles que l’on observe dans la composition moyenne du Soleil. 


Ce sur-enrichissement en éléments lourds suggère que l’étoile progénitrice de NGC 2440 — celle qui a donné naissance à la nébuleuse — était plus massive que le Soleil, et qu’elle a connu des phases de synthèse nucléaire avancées, au cours desquelles elle a transformé l’hydrogène et l’hélium en éléments plus complexes, ensuite éjectés dans l’espace interstellaire. 


Des modèles de photoionisation combinés à des données obtenues avec le télescope spatial Hubble ont permis d'estimer la masse de cette étoile progénitrice à environ 1,5 masse solaire ou moins. Ces éléments font de NGC 2440 un laboratoire précieux pour comprendre les processus d’enrichissement chimique de la Voie lactée et l’évolution des étoiles de faible à moyenne masse. Interactions avec le milieu interstellaire. 

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Au-delà de sa structure interne riche et tourmentée, NGC 2440 interagit activement avec son environnement. 


Des observations en infrarouge ont mis en évidence la présence d’un halo externe diffus, nettement plus étendu que ce que l’on perçoit en lumière visible. Ce halo semble être déformé et asymétrique, ce qui laisse penser qu’il subit les effets de l’interaction dynamique avec le milieu interstellaire environnant. Ces interactions se traduisent notamment par des phénomènes physiques tels que le processus de balayage par pression dynamique (ram-pressure), produite par le mouvement relatif de la nébuleuse à travers le gaz interstellaire. 


On y observe également des signatures d’instabilités de Rayleigh-Taylor, des structures caractéristiques formées lorsque des couches de gaz de densités différentes interagissent sous l’effet de la gravité ou d’un champ de pression.  


Ces mécanismes ont probablement façonné la forme extérieure du halo de NGC 2440, et contribuent à l’érosion progressive de la nébuleuse. Ce type d’interaction est crucial pour comprendre comment les matières éjectées par les étoiles retournent et s’intègrent dans le cycle de la matière galactique, nourrissant ainsi les générations futures d’étoiles et de planètes.

Références :

  • Herald, J. E. & Bianchi, L. (2004)Spectroscopic analysis of NGC 2440 with HST/STIS data, The Astrophysical Journal.

  • Hyung, S., Aller, L. H., & Feibelman, W. A. (1999)Spectrophotometric study of NGC 2440: over 300 emission lines, Publications of the Astronomical Society of the Pacific, 110, 466.

  • Gesicki, K. & Zijlstra, A. A. (2003)Kinematic modeling of planetary nebulae, including NGC 2440, Monthly Notices of the Royal Astronomical Society.

  • Pereira, C. B., Miranda, L. F. & Monteiro, H. (2009)Abundance analysis and progenitor mass of NGC 2440, Astronomy & Astrophysics.

  • Akras, S. & Steffen, W. (2012)Morpho-kinematic study of NGC 2440: a fragmented torus and multiple bipolar lobes, Monthly Notices of the Royal Astronomical Society.

  • Ramos-Larios, G. & Phillips, J. P. (2009)Infrared observations of NGC 2440 and interaction with the ISM, Monthly Notices of the Royal Astronomical Society (arXiv:0909.1839).

  • Kwitter, K. B. & Henry, R. B. C. (2012)Chemical abundances in planetary nebulae, including NGC 2440, The Astrophysical Journal Supplement Series.

Date  de création : 

Date  de modification :

01 09 2025

01 09 2025

Jean-Brice Gayet

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